5 - Asher et Jean-Claude : le départ
Asher et Jean Claude – départ
« Asher s’occupera de tout » avait dit Jean-Claude abruptement et Anita avait senti qu’elle avait manqué tant de non-dits, qu’elle aurait pu en emplir un immense carnet. Quelqu’un devrait écrire un jour un manuel de « comment comprendre les maîtres vampires français » pensa-t-elle avec irritation comme lorsqu’on n’arrive pas à saisir le fond des choses. Même en le bombardant de questions elle n’avait réussi qu’à le rendre son masque encore plus vide, enfin si c’était possible.
Oui, il devait aller absolument en Europe, non il ne se battrait pas, non rien de grave n’était arrivé et à part ça rien de plus.
Elle avait presque envie de se tirer les cheveux de frustration ou plutôt de lui tirer les cheveux à lui ce qui lui procurerait infiniment plus de satisfaction, tellement elle se sentait irritée et frustrée de ne rien comprendre. Malgré ce que déniaient les deux vampires, il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Ce n’est pas comme s’ils ne se parlaient pas, ou qu’ils se lançaient des coups d’oeils quand ils pensaient qu’elle ne les regardait pas, ou n’importe quoi d’autre. Non, il y avait quelque chose qui commençait à faire ressembler la guerre froide à un jour ensoleillé à Hawaï ! Une froideur pire que si elle sortait du congélateur.
« Je ne serai parti que deux jours » dit Jean-Claude, quand elle demanda si elle pouvait l’accompagner.
« Vous savez, je pourrai annuler mes rendez-vous et je suis sure que Zerbrowski et ses mecs peuvent se passer de moi juste pour deux jours. Je veux dire, combien de personnes peuvent être tuées pendant ces 48 heures ? »
« Non, ma petite » répondit Jean-Claude avec un très léger sourire qui semblait lui coûter un gros effort, je vais emmener Jason comme ma pomme de sang et Meng Die et Faust pour ma sécurité. J’aurais bien emmené Requiem mais ce ne serait pas bon de lui rappeler à Belle Morte tout ce qu’elle a perdu. C’est tout. Ils ne feront pas de tort à un sourdre de sang et emmener plus de monde serait l’exposer à l’insécurité. Il est tout à fait vrai que la politique vampirique, comme tu la nommes, est absolument sans règles. Il y a un certain jeu de règles cependant, et même le Conseil ne peut pas les rompre délibérément. Ils détiennent leur pouvoir à travers ces mêmes règles ».
« En êtes-vous sûr ? » lâcha doucement Anita comme si elle n’avait pas pu s’en empêcher.
« Tu doutes de moi ? »
« Non, ce n’est pas ce que je voulais dire Jean-Claude. N’en faites pas une sorte de drame personnel, c’est juste que je n’aime pas l’idée de vous savoir auprès de Belle Morte et tous ces damnés bâtards ! »
Sa bouche eut un rictus à cette évocation et Anita dû admettre que ça sonnait un peu de manière ridicule, mais d’un autre côté, elle ne voyait pas pourquoi des vampîres se donnaient de gentils noms français tels que « Mort d’Amour » ; on pouvait accuser son pragmatisme typiquement américain, la partie logique de son cerveau était en train d’hurler « c’est la reine des cauchemars » puis une autre partie plus illogique et probablement plus primitive se sentait émerveillée qu’un vampire de haut rang dans le monde puisse la présenter à « la reine des vampires ».
« Revenez-vite », dit Anita renonçant à découvrir tout le mystère entre Jean-Claude et Asher. Peut-être que avant que Jean-Claude soit de retour à la maison, la tempête se serait calmée ou quelque chose de la sorte ? Asher était peut-être seulement ennuyé parce qu’il était le second et devait rester ici pendant que Jean-Claude allait traîner là-bas dans le danger ?
« Je serai de retour avant que j’ai eu le temps de te manquer, ma petite » dit Jean-Claude avant de monter dans son avion personnel.
« Parfait, alors » Anita se haussa sur la pointe des pieds pour lui donner un baiser et réalisa qu’il allait lui manquer quand même ; deux jours, elle se sentit plutôt ridicule à cette idée. Mais bon sang, c’était embarrassant d’envoyer son boy-friend pour rencontrer juste les copains des cauchemars, de la mort et compagnie. Ce n’est pas étonnant que tous les films commencent par des scènes d’adieu avant que l’homme parte à la guerre !
Elle se tenait à côté d’Asher alors que le jet privé décollait, quittant le sol doucement.
« Oh je déteste les avions, pensa Anita et celui-là je le hais parce qu’il emporte Jean-Claude loin d’ici. »
« Bon, et bien ça y est » dit-elle remarquant qu’Asher avait de nouveau son masque inexpressif. Pourquoi ai-je ce mauvais pressentiment pour tout ça ? bon, c’est juste que ce Conseil devient de plus en plus écrasant.
« Ils ne lui feront pas de mal, affirma Asher.
Elle ne savait pas s’il essayait de la rassurer ou de se rassurer lui-même.
« Ils n’ont pas intérêt, sinon on ira leur régler leur compte, dit-elle, mais cette tentative d’humour tomba à plat et ressembla plus à une menace de violence.
Pour quelle obscure raison, cela sembla plus efficace pour remonter le moral d’Asher. Ils restèrent silencieux dans la voiture sur le chemin de retour vers le Cirque des Damnés et quand ils furent arrivés, ils pénétrèrent silencieusement dans le logement de Jean-Claude, par habitude. Tout semblait étrangement vide sans sa présence, mais Anita s’assit sur son lit comme d’ordinaire et Asher la suivit.
« Maintenant que Jean-Claude est absent, je suppose que tu es le maître de la ville par intérim ? »
Les cheveux dorés du vampire glissèrent sur son épaule alors qu’il fit un bref signe d’assentiment et elle ne pu s’empêcher des les caresser. Distraitement, Anita le poussa jusqu’à ce qu’il soit couché sur le dos, avec sa tête lovée dans son giron, les cheveux se répandant presque jusqu’au sol. Simplement faire courir ses doigts dans cette masse soyeuse, c’ était délicieux.
« Asher ? »
« Oui ? … »
Le ventre d’Anita était doux et chaud, son parfum l’envoûtait et il était un mâle, non ? Le désir qu’elle lut dans ses yeux lui envoya comme un flamme chaude à travers le corps et elle su que réfléchir n’était pas une priorité maintenant pour le vampire. Mais Anita décida de tirer partie de cet avantage.
« Asher, qu’est-ce qu’il y a entre vous deux, entre toi et Jean-Claude ? vous ne vous êtes même pas dit au revoir ».
Elle pouvait sentir la tension qui agitait tout le corps d’Asher au moment où il se forçait à se montrer relax et elle su qu’elle avait détruit son petit moment de contentement. Anita se sentit un peu honteuse de le pousser ainsi mais aussi c’était la preuve qu’il existait bien quelque chose entre ces deux-là.
« Il n’y a rien entre nous, ma chérie ». Il dit ceci sur un ton si détaché qu’elle sentait bien qu’il ne voulait pas en parler. Elle hésita à poursuivre mais un sentiment de peur l’empêcha d’entrer plus avant dans les eaux dangereuses. Après tout, elle avait essayé, non ? elle avait le sentiment que chercher à savoir quelque chose d’Asher serait tout aussi difficile que d’obtenir quelque chose de Jean-Claude et elle avait déjà échoué avec ce dernier.
« Bon, puisque tu en es certain… sois juste sûr de me dire si quelque chose arrivait entre vous avant que nous soyons dans un moment tel qu’il ne vous restera plus qu’à vous entretuer »
Comme réponse, Asher s’assit et s’arrangea pour la faire basculer sur le lit, si habilement qu’elle éclata de rire. Il se pencha vers elle, les bras de chaque côté, la maintenant prisonnière sous lui, et l’amusement d’Anita cessa d’un coup, car elle en eut le souffle coupé.
Elle sentit la main qui touchait doucement sa joue, le pouce caressant lentement sa lèvre inférieure et dans un court battement de cœur, elle entendit le son le plus léger, un murmure voilé qui disait son nom comme s’il avait parlé par inadvertance. Anita leva les yeux vers son visage et fut de nouveau interloquée par sa beauté. Il n’y avait pas de mots pour décrire comment elle se sentait sachant qu’il était à elle et à Jean-Claude.
Elle pouvait sentir l’odeur de l’eau de Cologne de Jean-Claude qui flottait sur le satin des draps, mais malgré cela Anita savait que bien qu’il s’éloignât d’elle de minute en minute, c’était comme s’il était là avec eux, puisqu’Asher était ici. L’amour se déversa en elle et parce que c’était Asher pour le moment, elle ne fut pas effrayée et pour une fois s’accorda le plaisir de le savourer pur et inconditionnel.
Le regard d’Asher la brûlait avec une telle intensité et elle se trouva submergée par des sensations : sa bouche qui descendait sur la sienne, chaude, douce, ses cheveux soyeux qui cascadaient sur ses épaules, son menton, son cou…
Ses paupières battirent, se fermèrent mais quand les rouvrit ce fut pour voir l’expression sur le visage du vampire, si désespérément tendre, avide, en quelque sorte aussi perdue qu’elle se sentait elle-même.
Même maintenant, il avait peur qu’un jour elle se réveille et qu’elle le rejette, qu’elle rejette Jean-Claude, qu’elle rejette leur amour. Il y avait un tel degré de prudence dans ses yeux qui lui disaient qu’il gardait son amour pour elle, pour Jean-Claude, soigneusement, parce qu’il y a bien longtemps Asher avait su que les cœurs sont des choses très fragiles, si facilement brisés, mais impossible à remettre entier.
Elle voulait enlever cette ombre de peine alors elle s’accrocha à son poignet quand il voulut se redresser, elle le tira vers elle, ses bras noués autour de son cou et elle l’embrassa amoureusement.
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