Plume et parchemin

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6 - Asher et Jean-Claude : arrivée en France

 

Cela faisait longtemps qu’il n’était pas venu en France ; c’était toujours un grand choc de voir comme tout avait changé en son absence, il voyait la France uniquement à travers le voile richement brodé de ses souvenirs. Les humains ont des souvenirs de rois, de guerres à travers les peintures, les films ensuite. Il est certain qu’un historien pourrait donner une description plus complète des évènements ou analyser les causes et effets mais Jean-Claude avait le souvenir vivant du passé, celui de l’éternité d’un vampire.

 

Il marchait dans les rues de la Ville Lumière mais se sentait comme un étranger, pourtant d’un autre point de vue, il était chez lui. Les panneaux portant les noms des rues étaient modernes mais leurs noms n’avaient pas changé. Autrefois, quand ils s’étaient rencontrés pour la première fois, il avait embrassé Asher dans cette allée sombre après une nuit de séduction soigneusement préparée. Autrefois, il avait désespérément voulu qu’Asher le regarde avec des yeux pleins de désir. Ils avaient été si hésitant à admettre leur amour, blasés par la cour dépravée de Belle Morte.

Ici, il s’était attardé, caché dans l’ombre, regardant l’aristocratie passer avec leurs perruques poudrées, leurs splendides robes de brocart, couvertes de bijoux étincelants alors qu’il attendait qu’Asher revienne d’un rendez-vous avec une jeune comtesse à la beauté réputée. Avait-il alors réalisé la profondeur de ses émotions, après avoir passé des heures à se tourmenter, possédé d’une jalousie irraisonnée ?

Il y avait tant de touristes, pensa Jean-Claude avec une pointe de colère. Paris avait  été à la fois glorifiée et ternie par son accessibilité. Il remarqua deux très jolies femmes, grandes et minces, avec un air de ressemblance dans leur genre de beauté et il su qu’elles étaient des models. L’une d’elle s’approcha, imaginant qu’il était l’un deux.

Il sentait sa présence derrière lui, confiante et il su qui elle était avant de se détourner. Belle l’avait toujours favorisée, bien qu’elle soit beaucoup trop douce, comme Musette. Mais il aurait été stupide de la mésestimer ; Jean-Claude tourna son visage vers elle.

« Chère Violeta, vous êtes venue m’escorter au Conseil ? » Il la dévisagea ostensiblement sachant qu’elle aimerait l’attention qu’il lui portait, pourtant chargée d’une subtile insulte. Son  nom était bien choisi, Belle Morte elle-même l’avait changée en vampire et dans le processus ses yeux étaient devenus d’une étrange teinte violette qui n’existait pas chez les mortels. Jean-Claude se demanda si quelqu’un se souvenait de son véritable nom. Cette nuit, sa robe dénudait ses épaules et la ligne de son cou avait une grâce sensuelle, suggérant des plaisirs passés et à venir.

Elle lui donna un baiser de bienvenue avant qu’il ne puisse l’en empêcher et délibérément écorcha sa lèvre sur la pointe acérée de ses canines, goûtant son sang. Jean-Claude avait trouvé autrefois les manœuvres dangereuses de la vampire très excitantes, maintenant il les trouvait légèrement ennuyeuses et il se demanda s’il avait perdu ses talents, ou si ses goûts avaient vraiment changés depuis qu’il vivait aux Etats-Unis.

Finalement, une limousine noire glissa le long du trottoir et ils entrèrent à l’intérieur.

Dans l’habitacle sombre, Violeta mit la main sur la poitrine de Jean-Claude, ses yeux brillants tels des améthystes « sourdre de sang, Jean-Claude ? tu as toujours été le meilleur d’entre nous pour les intrigues. J’ai entendu dire que tu avais remplacé – comment s’appelait-elle déjà cette servante humaine – et que notre Asher chéri est de nouveau auprès de toi ? Dis-moi comment as-tu fait pour qu’il te pardonne, alors que moi je n’aurais pas pu ? »

Elle s’approcha plus près et se glissa sur ses genoux à califourchon, le tissu de sa robe glissant sur le pantalon de Jean-Claude, mais c’était de la colère qui brûlait dans ses yeux beaucoup plus que du désir et  Jean-Claude savait que même après toutes ces années, Violeta avait toujours pensé qu’elle pourrait obtenir les attentions d’Asher et peut-être le gagner à la fin.

  • « Tu pensais qu’il allait te tomber dans les bras après mon départ ? »

Son rire fut méprisant « pourquoi lui aurais donné le plaisir de mon étreinte ? il est ruiné ! Belle tolérait uniquement sa présence parce que tu l’avait négociée avec elle quand tu l’as supplié de le sauver » et elle partit d’un éclat de rire grinçant.

  • Je lis le mensonge dans tes yeux Violeta, même maintenant, tu le voudrais, mais il est à moi !

Jean-Claude avait la satisfaction de voir que ses paroles l’avaient heurté durement ; un moment plus tard, son visage reprit son masque impassible, celui qu’ils avaient tous appris à utiliser, tous ceux qui avaient passé du temps à la cour de Belle Morte. Elle était tranquillement assise sur ses genoux et il se pencha en avant pour la forcer à se rasseoir et éviter son contact. La fureur enflamma ses yeux et le pouvoir s’amplifia entre eux.

  • Tu es tombé bien bas, Jean-Claude, pour accueillir un tel monstre dans ton lit, susurra-t-elle.

Jean-Claude la frappa d’un revers de main, assez fort pour lui briser le cou et elle glissa de ses cuisses et tomba sur le sol de la limousine. La cruauté avait été intentionnelle de sa part mais elle avait surestimé la tolérance de Jean-Claude.

Violeta se remit doucement et s’assit en face de lui, s’appuyant au coussin du dossier. De là, elle le regarda, mais il y avait un certain degré de prudence dans ses yeux maintenant, et elle resta silencieuse pendant un moment alors que Jean-Claude l’ignorait.

  • Dommage, tu aurais du amener Asher avec toi, dit-elle finalement, un léger sourire s’étirant sur ses lèvres.

Les mots résonnèrent comme un défi et Jean-Claude chercha d’en analyser la signification car il était certain qu’il y avait beaucoup plus dans cette phrase que seulement le désir de Violeta de revoir Asher. Elle avait été très confiante depuis le moment où elle l’avait vu, probablement un plan machiavélique de Belle Morte et ça c’était une mauvaise nouvelle.

  • Et il y a une raison particulière pour laquelle j’aurais du l’amener ?
  • Il aurait pu prendre plaisir à tout ce que Belle a arrangé pour toi, pour vous. Elle s’est donnée  bien du mal pour accueillir son favori.
  • Oh ? je pensais qu’il s’agissait seulement d’une introduction au Conseil, bien que je sache qu’ils me connaissent déjà, bien sûr.
  • Bien sûr, dit-elle en écho avec un petit rire grinçant, mais je suis persuadée que tu seras ravi.

 

De ça, il doutait fortement. Jean-Claude sentait que les plans que tramait Belle Morte autour de lui ressemblaient à un piège bien monté et il sut que lutter pour y échapper ne serait pas suffisant. Il n’avait pas survécu à tout ça autrefois sans en avoir appris les règles du jeu !

 

 



06/05/2012
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