8 - Asher et Jean-Claude : enveloppe et traquenard
Asher et Jean-Claude – roses pour Anita
Généralement, c’était Nathaniel qui apportait le courrier comme une des innombrables choses qu’il faisait en tenant sa maison. S’il n’y avait eu qu’Anité, qui sait quelle pile de lettres se serait accumulée avant que le facteur ne vienne sonner à sa porte. Micah l’apportait aussi quelquefois, quand il rentrait à la maison et s’était arrêté devant la boîte aux lettres. C’était un de ces petits détails auxquels personne ne prête vraiment attention, de toute façon la plupart du temps, à part les factures, le reste était bon pour la corbeille à papiers.
Anita rentrait du Cirque des Damnés et eut un vague sentiment de culpabilité en se disant qu’elle ne portait pas beaucoup d’attention et de soin à sa maison depuis quelque temps. Elle vérifia donc le contenu de sa boîte aux lettres puis entra chez elle. Elle fut frappée par le silence ; Damian était au Cirque, Micah n’étais pas revenu, retenu par une quelconque affaire urgente à régler et Nathaniel bossait aux Plaisirs Coupables cette nuit. La maison était bizarrement silencieuse, elle avait tellement l’habitude de partager sa vie avec tout le monde que ce soir, elle se sentait étrangement seule sans ses compagnons. Nathaniel lui manquait pour lui tenir chaud, et Micah pour la prendre dans ses bras et la rassurer et aussi de savoir que Jean-Claude allait bien. C’était un peu ridicule, il n’était parti que pour 48 heures.. oui, mais deux jours au Conseil ... une voix intérieure lui répétait toujours ces mots et, de frustration, elle lança la pile de courrier sur la table et vit les lettres qui s’éparpillaient. Avec un soupir, elle décida qu’elle s’en fichaît de laisser sa table encombrée, puis elle eut un remord et se décida à rassembler tout ce fouillis. Elle se mit à rassembler les lettres une à une et son regard fut attiré par une étrange enveloppe. Il n’y avait pas de timbre, pas d’adresse, mais son nom était inscrit clairement sur le dessus, au centre, une écriture inconnue et à l’encre rouge. A la fois intriguée mais aussi un peu inquiète, elle hésita, mais la curiosité fut la plus forte, elle ouvrit l’enveloppe.
Sur une carte toujours à l’encre rouge, des lettres très nettes traçaient ceci «Ma chérie, Asher attends au Cirque des Damnés… il t’attend. N’iras-tu pas le voir alors qu’il a besoin de toi ? »
Ce n’était pas d’Asher, elle en était sûre, c’était une plaisanterie ou quoi ? « ma chérie, » vraiment ! Elle en revenait du Cirque des Damnés et ils pensaient qu’elle allait faire immédiatement demi-tour et y retourner ? tout cela pour cette écriture bizarre à l’encre rouge ? mais pourquoi citait-on Asher et qu’est-ce que c’était que tout ce bazar ? avait-il vraiment besoin d’elle ?
Se sentant un peu ridicule, Anita attrapa le téléphone et appela le Cirque, juste pour vérifier. Ce n’était vraiment pas le moment d’être confrontée à ce genre de problème avec Jean-Claude absent. Alors que résonnait la sonnerie, elle se demanda si Nathaniel trouvait régulièrement ce genre de messages et le mettait de côté avec toute la pub pour ne pas l’inquiéter. Elle réfléchit et pensa qu’elle n’avait vraiment pas fait attention à ce qu’elle recevait et ceci depuis quelques mois.
« Allo ? »
Elle fut surprise d’entendre la voix de Damian, car elle avait appelé machinalement le bureau de Jean-Claude.
Il ne semblait pas du tout embarrassé : « Je cherchais Asher mais il a quitté le Cirque à toute vitesse. Il y avait un gros bouquet de roses sur la table. Peut-être est-ce en rapport avec Jean-Claude ? » Il laissa le reste en suspens mais tout le monde avait senti le froid entre le Maître de la Ville et son second.
« Il est parti à tout vitesse ? »
« Oui – Damien semblait étonné par le ton quelque peu anxieux d’Anita. Je crois qu’il te cherchait en fait. Il y a une carte près des roses, tu veux que je te la lise ? »
Anita hésita ; c’était peut-être très personnel si c’était de Jean-Claude pour Asher. Particulièrement à cause de tous ces non-dits entre les deux vampires. Mais elle avait un mauvais pressentiment malgré tout.
« Qu’est-ce qui est écrit ? »
Damian parut encore plus étonné « Je ne connais pas cette écriture – c’est trop net pour elle celle de Jean-Claude »
Net ? comme la petite note qu’elle avait reçue ? Anita avala péniblement sa salive, essayant de contrôler un début de panique qui commençait à l’envahir. « Damian, est-ce écrit àçleencre rouge ? rouge foncé comme du sang ? »
« Oui, c’est ça, mais il n’y a rien d’écrit sur la carte, Anita. Juste le nom d’Asher sur l’enveloppe et sur le parchemin à l’intérieur » dit Damian de plus en plus perplexe.
« Et Asher est parti rapidement après avoir vu cette carte ?
Damian confirma que oui, augmentant la peur chez Anita. C’était trop bizarre, ou bien Asher avait reconnu l’écriture et quelque chose en relation avec l’envoi des roses et l’encre rouge, quelque chose qu’Anita et Damian ne savaient pas. Etait-ce une marque d’un ancien vampire qu’Asher aurait connu ? et il était parti rapidement pour rencontrer ce vampire inconnu ?
Tu ne vas pas le voir, s’il a besoin de toi ?
Anita hésite et décide que ça ne ferait pas de mal après tout d’aller vérifier ce qui se passait, surtout avec Jean-Claude absent.
« J’arrive dit-elle à Damian ! reste à la porte du Cirque et si tu vois Asher, assure-toi qu’il ne va aller nulle part. Il y a quelque chose d’étrange qui se trame, soit prudent. »
Elle raccrocha sans même un au-revoir. Elle repêcha ses clés dans sa pochette pensant que celui qui avait envoyé ces cartes avait réussi ce qu’il souhaitait après tout, puisqu’elle se dirigeait droit sur le Cirque. Elle espérait seulement qu’Asher allait bien.
Elle était à peu près à mi chemin du Cirque quand une silhouette sombre portant une cape atterrit sur la route juste devant sa voiture. Elle écrasa la pédale de freins, entendant les pneus hurler. Ses phares éclairaient partiellement la silhouette en face d’elle, mais c’est quand elle se tourna vers elle, qu’Anita put voir entièrement son visage.
Des cheveux en désordre qui tombaient jusqu’aux épaules, des yeux qui semblaient noirs et un visage et un corps qui auraient pu appartenir à un modèle. Son torse était nu et brillait comme tout le reste de sa personne. Anita eut la perception d’un Maître Vampire très puissant, de plus de mille ans sans doute et elle attrapa son Browning sentant son poids rassurant dans sa main. Le seul problème était que ce serait beaucoup trop léger en face d’un vampire aussi puissant. Elle n’avait pas de balles emplies d’eau bénite, elle savait qu’elle aurait dû les demander à Edward quand il lui avait offert de lui en fournir, elle était trop bornée…
Derrière ce vampire, une figure apparut et Anita aurait juré qu’elle avait vu la forme d’ailes de chauve-souris dans la lumière lunaire ; je deviens folle ou quoi ? la nouvelle arrivante était une toute jeune fille, visage innocent et frais, la peau complètement pâle, non seulement parce qu’elle était d’origine européenne mais plutôt d’un blanc nacré qui tranchait avec des cheveux noirs qui voltigeaient autour de son visage. Des rubans de satin noir étaient noués sur ses jambes, comme si elle avait été une danseuse, et la même chose autour de ses bras. Sa robe était entièrement noire et elle glissait avec grâce vers Anita.
Elle ne prit pas le temps de réfléchir, elle retira simplement la sécurité et visa le vampire mâle en premier. Elle tira à travers le pare-brise qui éclata et la balle le frappa de plein fouet mais il continua à avancer comme s’il n’avait rien senti. Il n’était plus qu’à quelques pas de la voiture maintenant. Anita brisa la glace et tira de nouveau, emplie d’une terreur sans nom. Oh mon Dieu, il est si près ! Sa croix se mit à flamboyer, elle l’arracha et la jeta au sol alors que la lumière diminuait.
Non, elle n’allait pas perdre la tête comme ça, même avec un maître vampire s’approchant d’elle. Mais il lui injectait de la peur, essayant de la dominer. Elle lui envoya son pouvoir, entrant avec le sien propre quand la fille ajouta sa propre puissance faisant éclater le bouclier d’Anita comme si c’était un jouet en plastique.
C’était trop tard maintenant, la main du vampire passa à travers la vitre et attrapa son Browning le jetant au loin. Anita lutta pour réfléchir si elle avait encore ses couteaux et elle devait faire quelque chose. Mais avant d’avoir seulement esquissé un geste, il avait ouvert la portière et elle se retrouva trébuchant dehors. La fille la regardait avec des yeux calmes, ses lèvres formant une moue enfantine comme si elle s’ennuyait.
« Anita Blake, quel plaisir de vous rencontrer » la voix de l’étranger avec un accent très British, classe … son nom américain paraissait presque déplacé avec le reste de la phrase. Les doigts du vampire saisirent ses poignets fermement comme un étau, pendant que la fille lui retirait ses couteaux. Anita se débattit, la peur et la colère envahissant son esprit, il la força à revenir au calme ; « qui êtes-vous ? » arriva-t-elle à dire d’une voix faible.
« On me nomme Victor, elle c’est Lucine, mon amour ». Ses yeux brillaient comme de l’onyx et Anita était saisie, incapable de se dégager de se regard. Cela ne lui était pas arrivé depuis très longtemps, elle devenait trop confiante avec l’immunité que Jean-Claude lui avait transmise et à cause des propres pouvoirs, mais maintenant elle était face à un vampire qui occultait ses défenses et la dominait facilement. Comme autrefois avant les marques de Jean-Claude. Tout ce qu’elle arrivait à saisir c’est : ce vampire est français mais son accent est parfaitement British.
« Je devrais vous tuer maintenant, mais vous serez une invitée absolument délicieuse, j’en suis sûr et j’ai toujours aimé les divertissements d’Asher… vous savez, je l’ai connu dans les temps anciens, lui et Jean-Claude aussi. Ils n’auraient pas dû s’unir »
Lucine pris un long morceau de tissu noir et la bâillonna.
Anita n’eut même pas l’idée de crier avant. Sa force alimentait sa peur, ou peut-être sa peur prenait-elle de l’ampleur avec la force du vampire, c’était difficile à dire. Elle se déroba de ces mains osseuses et blanches, mais elles étaient aussi dénuées d’émotion que les yeux de Lucine. Celle-ci déposa un baiser sur la joue de son partenaire et se recula. Est-ce que Lucine augmentait le pouvoir de son amant ? quelque chose chez Lucine sonnait affreusement, horriblement faux, même si elle ressemblait à une ravissante poupée gothique. C’était comme si il y avait une sorte d’aura qui renvoyait tout ce qui était projeté, ses pensées, ses sentiments, ses peurs, spécialement ses peurs.
Lucine enfin exprima toute son adoration pour son amant. Sa voix était celle d’une gamine, comme son apparence, mais pleine d’une froideur implacable.
« Et maintenant, Victor ? »
« On attend Asher, répliqua-t-il faisant courir nonchalamment ses doigts dans les boucles d’Anita. Ou bien on va à sa rencontre ? qu’en penses-tu ? qu’est-ce qui lui causera le plus de mal, de la voir juste comme ça, ligotée et soumise et noyée de terreur ou bien de trouver sa voiture endommagée et qu’il cherche ce qui s’est passé ?
« Allons au Cirque, mon chéri. Je veux voir ce que Jean-Claude a installé comme demeure, quelque chose qui a plus de charme pour lui que les délices de la France »
L’éclat de rire soulignant ces derniers mots étaient plutôt menaçants faisant référence à des méthodes d’exquises tortures, plutôt qu’à des divertissements.
« Comme tu veux, Lucine » Il posa sa main sur la joue d’Anita et se pencha tout près. Elle hoqueté alors qu’elle sentait son souffle sur son visage, doux et parfumé à la menthe. Ce fut la seule chose qu’elle ressentit avant de sombrer dans l’obscurité.
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