Chapitre 6 : la guerre
6 - Déclaration de guerre
Deux jours après ce bal, les dirigeants présentent une requête pure et simple : « les Magyars souhaitent un gouvernement indépendant pour la Hongrie ». François-Joseph, surveillé de loin par sa mère, l'archiduchesse Sophie qui lui enjoint de ne pas se livrer à un « libéralisme hâtif » refuse de faire des concessions, d'accorder ne serait-ce qu'un ministère. La déception est très grande et amère pour les Hongrois.
A Vienne pourtant, les commentaires se font très acerbes, le parti conservateur pense que l'empereur et surtout l'impératrice (toujours la plus critiquée) accorde trop de faveurs à la noblesse magyare.
Alors le 5 mars, les souverains reprennent le chemin de retour pour Vienne. En montant dans le train impérial, Elizabeth une dernière fois exprime son amour pour ce pays aux dirigeants venus l'accompagner :
- J'espère pourvoir revenir bientôt dans ma Hongrie bien-aimée !
Elle a mis tant de chaleur en prononçant ce mot, « bien-aimée » que tous les dirigeants à commencer par Andrássy en sont bouleversés surtout lorsqu'ils voient les yeux de l'impératrice se remplir de larmes.
Mais au printemps, elle ne revient pas.
- La guerre -
La vie à Vienne a repris son cours monotone et Elizabeth ne pense plus qu'à une chose, retourner en Hongrie, dès que possible.
Elle aurait bien aimé aller à Füred (ville d'eau près du Lac Balaton) pour sa cure habituelle au lieu de Bad Kissingen, malheureusement la situation politique se détériore de jour en jour et finalement la déclaration de guerre avec la Prusse a lieu le 15 juin 1866.
Le château de Buda l'attendit une année entière. Les fenêtres s'ouvrirent sur le printemps, le soleil baigna les vastes pièces, réchauffa les murs froids.
A Balaton Füred aussi on l'avait attendue. L'appartement avait été aménagé pour elle, les roses disposées dans les vases, et on avait même construit des routes, mais Elizabeth n'était pas venue.
L'armée autrichienne subit défaites sur défaites et les blessés arrivent par convois entiers. Elizabeth joue son rôle de consolatrice en visitant les hôpitaux, s'arrêtant auprès d'un blessé. Elle assiste même un pauvre bohémien qui refuse l'amputation d'un bras et qui n'accepta que lorsque l'impératrice lui dit qu'elle allait rester à côté de lui. Elle lui tient la main valide comme un ange attentif et même à son réveil il la trouve encore veillant sur lui.
Son courage et son dévouement font l'admiration de tous, même de l'archiduchesse et pourtant il se trouve encore quelques mauvaises langues pour la critiquer, arguant qu'elle s'arrête plus longtemps au chevet des blessés hongrois.
- Mais ces pauvres soldats n'ont personne à qui parler et je suis heureuse de leur apporter un peu de réconfort dans leur langue maternelle, répond l'impératrice outrée.
Quand après le désastre de Sadowa, immonde boucherie, le danger se rapproche, les troupes prussiennes n'étant plus très loin de la capitale, l'empereur et le conseil des ministres décident de mettre en lieu sûr les valeurs, le trésor les documents importants. On fait des malles et on les envoit à .. Buda ! Elizabeth voudrait rester auprès de son époux, malgré l'étouffante chaleur d'été et son air pâle et amaigri. François-Joseph, trop inquiet pour elle l'envoie le 9 juillet vers Buda, accompagnée de la fidèle Ida.
Elle pense arriver à la gare incognito mais à sa grande surprise deux hommes en redingote l'attendent sur le quai, Deák et Andrássy, accompagnés par d'autres dirigeants hongrois.
Deák a personnellement tenu à assurer un accueil convenable à l'impératrice et dès le matin, il a rendu visite à ses amis afin de les prier de l'accompagner à la gare.
« Je tiendrais pour une lâcheté de tourner le dos à l'impératrice quand elle se trouve dans le malheur, après l'avoir fêtée quand les affaires de la dynastie allaient bien » leur avait-il déclaré.
Trois jours plus tard, elle repart pour Vienne afin de reprendre les enfants qui revenaient de Bad Ischl, puis tous ensembles, ils repartent vers la Hongrie.
Elizabeth sait combien elle est aimée des Hongrois et en emmenant la famille impériale elle espère renouer des liens plus étroits entre les deux pays alors que les négociations ont été rompues. Elle a entendu parler de mouvement de soulèvements en Hongrie, des groupes d'opposition espérant profiter de la faiblesse de l'Autriche pour se séparer définitivement d'elle. Elle sait que Deák et Andrássy ont la confiance de la nation et qu'ils sont, eux, favorables à un compromis signé entre les deux pays, faisant de la Hongrie un pays participant à la monarchie et non plus un vassal.
Alors, pour assurer la sauvegarde de l'empire, Elizabeth va tout tenter pour persuader l'empereur de recevoir Deák et Andrássy afin qu'il nomme le comte au moins ministre des Affaires Etrangères car, pense-t-elle, lui seul peut résoudre les problèmes en apportant le soutien de la Hongrie. Mais il faut faire vite, car Kossuth déjà complote pour reprendre les rênes et fomenter une nouvelle révolte dans le pays.
Il s'en suit des discussions interminables avec Andrássy dans la villa Kochemeister qu'elle a louée sur les collines au-dessus de la capitale (le château d'Ofen a été réquisitionné pour devenir hôpital militaire).
Le comte ne cesse de faire l'aller et retour entre Vienne et Pest et à chacun de ses retours, il revient déçu car l'empereur est trop indécis ou trop conservateur et ne se laisse pas fléchir pour signer le compromis tant attendu et nommer Andrássy ministre.
Elizabeth, pour une fois totalement impliquée dans la politique de la monarchie, se fâche et écrit à l'empereur presque tous les jours des lettres insistantes afin de lui faire comprendre l'urgence de la situation. Puis elle rencontre de nouveau Andrássy et leurs discussions reprennent de plus belle.
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