Emile Nelligan - La vierge noire -
Elle a les yeux pareils à d'étranges flambeaux
Et ses cheveux d'or faux sur ses maigres épaules,
Dans des subtils frissons de feuillages de saules,
L'habillent comme font les cyprès des tombeaux.
Elle porte toujours ses robes par lambeaux,
Elle est noire et méchante ; or qu'on la mette aux geôles,
Qu'on la batte à jamais à grands fouets de tôles.
Gare d'elle, mortels, c'est la chair des corbeaux !
Elle m'avait souri d'une bonté profonde,
Je l'aurais crue aimable et sans souci du monde
Nous nous serions tenus, Elle et moi par les mains.
Mais, quand je lui parlai, le regard noir d'envie,
Elle me dit : tes pas ont souillé mes chemins.
Certes tu la connais, on l'appelle la Vie !
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